Le noir et le blanc des gravures à l’encre de Chine d’Anne Stephane, appartenant au fonds Anne Stephane acquis par la Bibliothèque des Champs Libres, sont « les premières couleurs de [son] œil, [celles] du costume breton », de la robe noire et de la coiffe blanche (Ms 2394/55, 22 janvier 1977). Comme le commente Oster : « ce que nous montre l’artiste, ce sont les traces qu’elle porte

en elle qu’on ne décrit pas mais nous fait sentir : des idées de taillis bordant les chemins creux et protégeant du vent des cultures, les encoignures profondes des pierres et cailloux qui nous parlent la langue sonnante et secrète des Celtes ».
Anne Stephane « écoute la voix de la nature qui se cache derrière [son] cœur » (Ms 2394/27 12 janv. 76). Ses tableaux « faits de la rencontre alchimique de l’encre noire et du papier blanc » constituent des « résurgences de traces profondes du pays breton » (Oster) : l’estran (Entre haute et basse mer), la complainte de Dahut, la korrigane ou le goéland – « la présence aux yeux de sel » – de Déraison

ou des petits tableaux accrochés sur mes jours, la lande, la chaleur des genêts, les forêts enchantées avec leurs mousses ou roches merveilleuses qu’exhalent ses Balades à Brocéliande de 1973 à 1980. En dépit du foisonnement apparemment anarchique des « taches », s’impose très vite au regard une composition ; celle-ci s’ordonne tantôt autour d’un centre d’où naissent les jeux de lignes et de contrastes tantôt dans un jeu de courbes et de contre-courbes qui s’imposent comme négativement dans les matières plates de la tache. Ainsi naît une nouvelle forme d’illusionnisme en peinture, une illusion de matières par des techniques plates.
Laissons le dernier mot à Catherine Guglielmi, poète et critique d’art de la Fondation Michel-Ange, qui apprécie le cahier des jours pas comme les autres : « Vous avez le don de trouver les mots qui font image dans un libre jet qui peut réconcilier les ‘non poètes’ avec les sources de la poésie » (Ms 2394/132).
Les amis d’Anne Stephane font vivre son œuvre sur le Net par leur site qui emprunte son nom à l’œuvre éponyme de l’artiste.
Françoise, Rennes, Bibliothèque Les Champs Libres