Louis Mila, Les écoles d’agriculture de France, Société des agriculteurs de France, 1936
Recueil des sujets donnés aux concours d’admission aux écoles nationales d’agriculture

Parmi les premières filles admises à l’École Nationale d’Agriculture de Rennes en 1939 au titre d’auditrice libre, Claire Girard démontra par la suite une détermination et une étonnante énergie dans son parcours professionnel et en tant que résistante.
Formée d’abord à l’ENSAR, puis à Grignon à partir de novembre 1940, la jeune étudiante ne passe pas inaperçue le jour de la rentrée à Rennes.
Dans ses lettres, elle confie qu’elle a fait une « entrée épique » :
« …Premier jour : les « Bizuths » sont ravis d’avoir une jeune fille parmi eux.
Deuxième jour : ils ont été montés la veille par les Anciens contre cette fille qui a osé franchir l’enceinte de leur école…
Troisième jour : tout est oublié, les Anciens sont très polis, les « Bizuths » exquis..
Quatrième jour et suivants : les garçons sont habitués à voir une fille parmi eux et la fille est habitué à ses 152 garçons ».
Curieuse et réfléchie, elle apprécie les cours « passionnants, épatants, mais à l’emploi du temps très chargé.
« Le matin, nous avons des cours théoriques, l’après-midi les applications : on sème, on mesure un champ, on fait des exercices d’estimation, de surface, on reconnaît des plantes,…»
Après plusieurs stages dans des fermes en zone occupée, le directeur des messageries de presse, Georges Marchand, la place à la tête d’un domaine de 87 hectares en Picardie, à Welles-Pérennes, fin 1943. Elle est chargée de reprendre en main cette ferme laissée dans un quasi-abandon, pour alimenter la coopérative de l’établissement. Organisée et volontaire, Claire Girard s’assure très vite le respect de ses 10 ouvriers agricoles et de ses voisins cultivateurs :  «…c’est un métier merveilleux, le plus beau je crois. L’alliance de cette grande force qu’est la terre avec le petit bricolage de nous humains, est quelque chose de si profond. »

Portrait de Claire Girard

Son père et son frère avaient été déportés par les Allemands en 1942 et 1944. Quant à sa sœur, Anise Postel-Vinay, résistante, elle fut arrêtée en août 1942, en possession de plans destinés aux Alliés et envoyée au camp de concentration de Ravensbrück.
Bien que n’appartenant à aucune organisation ou réseau, Claire Girard aida de nombreuses personnes en fuite. Mais le mystère reste entier sur son action précise dans des actions de résistance. Sous l’Occupation, les femmes résistantes restent bien souvent des combattantes de l’ombre…
A Paris au moment de sa Libération, Claire Girard revient vers Welles-Pérennes, le 27 août 1944, avec deux jeunes des FFI (Forces Françaises de l’Intérieur), pour collecter du ravitaillement. Ils sont arrêtés à un barrage allemand à Courdimanche. L’un de ses compagnons réussira à s’échapper, alors que Claire et l’autre résistant seront fusillés dans l’heure.
Elle avait 23 ans.

Lettres de Claire Girard, fusillée par les Allemands le 27 août 1944 (1954) Cote : B/07.010

S. Levert, J.-M. Hinault, Agrocampus Ouest, 2021