L’exposition, présentée du 12 octobre 2018 au 20 janvier 2019, au musée d’art contemporain de Bordeaux – à laquelle la Bibliothèque de Rennes Métropole a prêté vingt cartonnages de Paul Bonet, issus du fonds Pollès – nous donne l’occasion de présenter ce relieur.

[i] HP 3728 Dos
[i] HP 3728 Dos
L’artiste viennois Florian Pumhösl a été séduit par la sérialité des motifs géométriques des cartonnages  aux couvertures muettes – dont les noms des auteurs et les titres sont relégués au dos du livre [i]. Cette idée est née des ébauches, des pochoirs de gaufrage et des gouaches de la main de Bonet, ainsi que des dessins préparatoires et des exemplaires fragmentaires de sa production.

Devant le succès rencontré par ses reliures, Paul Bonet (1889-1971) abandonne en 1930 son métier de modéliste. Celui qui se qualifiait d’«essayiste de la reliure» s’est rendu célèbre auprès des bibliophiles par ses reliures d’art faites à la main, mais aussi auprès d’un plus large public par ses maquettes de reliures industrielles. Il effectue des recherches de décors pour reliures industrielles qui n’aboutiront qu’en 1940, lorsqu’il réalise ses premiers cartonnages publiés par les frères Gallimard, tout en continuant ses recherches formelles pour ses reliures originales.

HP 3707
[ii] HP 3707
Il exécute plusieurs centaines de prototypes (552 au total) pour la maison d’édition Gallimard (anciennement NRF), de 1941 à 1967. L’intelligence de Bonet est d’avoir, pour un même auteur, gardé un même graphisme ; à chaque auteur est associé un système de composition propre : bandes horizontales ressemblant à des touches de piano rouges et noires pour Malraux [iii], compositions formées à partir de lignes horizontales de différentes longueurs pour Paul Valéry.

HP 3675
[iii]. HP 3675
Toutes les reliures d’un même auteur ont une parenté graphique, mais sont dissemblables dans les détails de l’interprétation [ii].

Certaines, le reconnaît le relieur, ont une dureté, une sécheresse un peu géométrique, gratuite, par sa facilité. Mais l’important est une perfection du genre atteinte. Car il y a un plain-chant des lignes et des formes et si les fonds blancs lui furent à l’origine imposés, il en connaît toutes les valeurs.

Ainsi met-il en application ce qu’il écrit, en 1933, dans ses carnets : «Le décor d’une reliure prend en premier ce qu’il a de hautement spirituel, mais en le tempérant de concret afin d’éviter l’impersonnel, fait en sorte qu’il tente d’exprimer l’âme du livre sans tomber dans un pittoresque vulgaire, en concordance avec les nouvelles tendances picturales».

Françoise, Rennes, Les Champs Libres